Design Thinking et patrimoine historique

Comment le Design Thinking peut servir le rayonnement du patrimoine historique ?

L’important à retenir dans cet article :

Le patrimoine est mort. Vive le patrimoine !

A travers le design et la collaboration, les activités liées à la « gestion du passé » vivent un formidable renouveau. Les monuments historiques peuvent en profiter pour s’inscrire dans l’avenir. Encore des clés pour les acteurs, « activateurs » du patrimoine… Le patrimoine va de l’avant ! Suivez-le !

 (image ci-dessus : Lille, capital mondiale du design – admirabledesign.com)

En 2016, la sonnette d’alarme est tirée.

En 2016, près de 3000 monuments seraient officiellement en vente – mais officieusement, il s’agit de tellement plus qu’on n’ose l’écrire. L’Etat diminue de 100 millions d’euros le budget alloué aux sites historiques et 30 départements français ne les financent plus. Onze associations du patrimoine publient ensemble la « Lettre ouverte aux Français et à leurs élus

sur le patrimoine » (Michel de Maule, décembre 2016) contenant 22 propositions pour préserver, conserver et faire rayonner le patrimoine matériel, immatériel, naturel et bâti…

En 2017, les châteaux semblent à l’article de la mort.

La semaine dernière, Stéphane Bern, nommé par Emmanuel Macron pour « recenser les patrimoines en péril » aurait reçu plus de 1700 dossiers (2500 aux dernières nouvelles) et annonce que 7% des châteaux français seraient « en péril ». Même si la notion nous apparait quelque peu audacieuse, il semble qu’une partie de notre patrimoine approche de la fin…

Depuis longtemps, malgré de franches réussites, ce constat fait froid dans le dos.

Pour en savoir plus, ayez la curiosité de taper « Château » dans le moteur de recherche et voyez. Globalement, il y a des blogs lancés par des associations locales pour sauver in extremis un château de la vente aux qataris dont Gignon est un exemple, il y a des articles sur la dernière vente de 150 domaines viticoles bordelais à des Chinois, il y a la description de la destruction « par inadvertance » des 13000 m2 du Château de Bellevuepar son propriétaire russe, il y a « une centaine de châteaux à vendre pour 1 euros » en Italie… il y a…

Des monuments souffrants. Oui, mais ils ont des amis à leur chevet.

Car sur les réseaux sociaux, c’est une autre affaire… On y apprend que des Australienssont invités à acheter des châteaux français moins chers qu’un 3 pièces à Sydney, on y découvre aussi un dynamisme formidable du grand public, le plus souvent, autour d’opérations de sauvetage. Urgence Patrimoine en particulier, mais aussi Adopte un Château, s’activent avec une passion admirable pour venir à bout des silences, des abandons, des pierres qui tombent et, parfois, de la simple inconscience générale.

Le patrimoine est mort ? Aller, vive le patrimoine !

Parce que pour nous, un nouveau patrimoine est né, entrainé par quelques uns !

C’est maintenant l’ère des châteaux des propriétaires entrepreneurs, des gestionnaires responsables, de ceux qui pensent que tradition peut rimer avec innovation, de ceux qui veulent s’enraciner dans une histoire pour grandir celle de demain, de ceux qui cherchent leur autonomie et leur indépendance, en se rendant acteur et « activateur » de territoires, collaborateurs d’initiatives

locales, promoteurs de culture et protecteur de l’identité française, à l’instar du propriétaire du Château de Millemont, qui a profité de l’événement de la COP 21 pour lancer sa POC 21 (« Proof of Concept ») autour de projets novateurs…

A tous ceux là, chapeau !

C’est aussi l’ère des sites qui n’ont pas les solutions mais qui s’activent pour les trouver, en dehors des sentiers battus et rebattus. A tous ceux là, bravo !

Pour accompagner les démarches de chacun, il existe quelques clés. En voici deux.

Le design, une clé pour approcher le passé et « réveiller nos morts ».

Derrière toutes les innovations techniques, il y a le design. Et derrière tous les nouveaux produits, les nouvelles campagnes de communication, les nouvelles offres culturelles, il y a le design.

Derrière le design ? Il y a une volonté de fluidifier, simplifier, améliorer, rendre ergonomique, rendre beau, rendre accessible, pour le plus grand nombre. Le design, c’est « juste » ça ; et c’est « tout » ça.

Pour le Larousse, c’est la « discipline visant à une harmonisation de l’environnement humain, depuis la conception des objets usuels jusqu’à l’urbanisme ».

Pour la Harvard Business Review, le design est arrivé à maturité dans le « design thinking », le « design de la pensée » qui s’éloigne de l’ordre « analytique » pour chercher autrement à répondre à des problèmes, à présenter, à organiser, à chercher.

Il impacte nécessairement la façon d’approcher ou de traiter le passé.

Par exemple, par le développement de l’ « entertainment » (le divertissement) ou de la « gamification » (de « Game », le jeu), le design numérique permet de rapprocher et d’éduquer les jeunes populations aux codes d’avant, avec les codes d’aujourd’hui. Un peu différemment, et en le faussant, les jeux vidéo comme Assassin’s Creed, Age of Empire ou Donjon & Dragons, mettent « le Moyen Âge en jeu » et bénéficient de l’attractivité du passé mystérieux de l’époque médiéviale pour attirer les joueurs d’aujourd’hui.

Dans un registre tout aussi immersif mais plus sérieux, le design numérique tel que pratiqué par 3D Dassault ou liconem dans les reconstitutions numériques du patrimoine historique fait le chemin inverse. Ils fournissent de nouveaux supports attractifs pour visiter le patrimoine ancien, constituant ainsi des supports de travail de grande qualité pour améliorer encore les techniques de construction moderne.

Les design stratégiques, opérationnels ou « produits », font partie de toutes les

organisations qui tirent leur épingle du jeu aujourd’hui. Ils peuvent devenir des moteurs de l’activité de gestionnaires de monuments qui cherchent à réconcilier le passé avec l’avenir. Guédelon a été élu le prochain « château à classer », selon les lecteurs du 20 minutes. Le design n’y est pas pour rien : de l’invention du concept jusqu’à la mise en oeuvre et au style graphique…

Oui, le design est clé !

L’économie collaborative, une clé pour valoriser le passé et le propulser dans l’avenir.

Uber, Airb&b, MyMajorCompany… ces entreprises ont tantôt le vent en poupe, tantôt le vent en proue. Critiquées, fragilisées, c’est tout de même grâce à elles que l’on peut penser possible des actions qui étaient jusque-là impensables.

Elles nous ont fait entrer dans l’ère du « crowd ». Elles ont rendu vraie la maxime « l’union fait la force ». Avec les start-up du patrimoine, signe que les châteaux entrent doucement dans l’ère nouvelle, le renouveau des modèles économiques, juridiques et opérationnels est en marche.

Avec Dartagnans, Rêve de Château, Covoitur’art, OhAhCHeck ! on finance, on accède, on apprend à plusieurs.

Les plateformes ainsi créées permettent de sortir progressivement des systèmes d’apprentissage, de distribution, de communication, de gestion ancestraux pour trouver un nouvel intérêt économique, une nouvelle rentabilité par une redistribution plus équitable de la valeur créée.

Non seulement l’union fait la force, mais elle est indispensable.

Nous pensons qu’il faut aller plus loin. Nous pensons qu’il faut travailler à un « remaillage » de la France des châteaux pour perdurer…

Pour aller plus loin

8 campagnes de communication efficaces

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Le numérique et les parcours de visite augmentés