Signalétique et orientation du public dans un monument

Signalétique et orientation du public dans un monument – quelles actions mener ?

L’important à retenir dans cet article :

Accueillir du public dans un monument historique ou dans des jardins n’est pas une simple affaire. Eviter les dérapages, les entrées dans les espaces dangereux ou privés, guider vers les points de vue qui ont de l’intérêt, mener une visite… ces éléments se préparent avec soin, et l’efficacité de l’accueil repose en partie sur la signalétique. 

En tant que designer diplômé en Art Graphique et option signalétique en dernière année, Antoine de Saboulin – freelance depuis 5 ans et directeur artistique de start-up à ses heures – accompagne les établissements dans la réalisation d’identités visuelles, de logos… et de leur signalétique.

Il nous donne quelques clés d’expert pour bien orienter son public.

Qu’est-ce qu’une « bonne signalétique » ? 

Une bonne signalétique doit répondre à 2 critères principaux : 
– être visible
– être adaptée au lieu et à l’environnement

Pour cela, les codes visuels du lieu sont importants. Par exemple, si la signalétique du métro est vive et colorée pour attirer l’attention, celle du Château de Chambord doit épouser les mêmes styles architecturaux que le domaine, aussi bien que des critères visuels qui évoquent la culture.

Quel type de signalétique installer ? (Fléchage, panneaux de couleurs, typographie…) 

La signalétique est sélectionnée suivant le lieu et le message à véhiculer. 

Par exemple, celle d’une exposition ne sera pas la même que pour orienter son chemin dans le métro, où les couleurs nous indiquent quelles lignes suivre pour se diriger vers la destination souhaitée.

Pour l’exposition, le cheminement sera davantage « littéraire », avec quelques textes, plus lisibles sur un mur uni. Des panneaux doivent pouvoir être installés pour attirer l’œil et être mobiles, pour se fixer n’importe où, là où les besoins de la visite l’imposent.

Avant de commencer à développer la créativité, le designer cherchera à s’imprégner du lieu et vérifier les conditions extérieures… Par exemple, en plein air, la signalétique doit résister au temps et à l’eau. Alors qu’en intérieur elle répondra à d’autres critères, tels que la hauteur du plafond, les couleurs des murs…

Quelles sont les démarches pour bien installer ses indications ?

Il y a plusieurs étapes pour cette démarche.

La phase de compréhension

Les clients qui commandent une signalétique posent dès le début un cahier des charges avec leurs souhaits.

Le designer échange avec le demandeur, qui nous fait part du projet. Si le propriétaire / gestionnaire décide de le faire lui-même, cette étape consistera en la clarification de ses propres besoins, de l’image qu’il veut renvoyer selon la thématique de la visite ou des lieux. Les formaliser sur un papier se révèle souvent indispensable pour éviter toute imprécision…

La phase d’immersion créative

Le designer se rend sur place et s’imprègne de l’identité visuelle du lieu. Accompagné de la personne en charge du projet, il comprend en détail ce qui est attendu, comment est élaboré le cheminement de la signalétique lors du parcours de la visite. 

Il commence alors à hiérarchiser les niveaux d’information : ce qui relève de la visite, ce qui relève du lieu, ce qui relève éventuellement d’autres choses (toilette, buvette, indications liées aux normes ERP…).

Si le propriétaire / décide de le faire lui-même, il doit « jouer le jeu » du parcours. S’il s’agit d’une visite guidée ou orientée, il s’agira pour lui de réaliser le parcours et de formaliser l’ensemble des choses qu’il imagine. S’il s’agit d’orienter des personnes dans un lieu « libre », il pourra être utile de faire évoluer dans les espaces une tierce personne afin de comprendre le cheminement « naturel » à réorienter… 

C’est à ce moment-là que les questions de type « pourquoi ce lieu n’est pas accessible ? Que se cache-t’il ici ? Je vais où juste après ? » ne doivent pas être contournées. 

La « bonne signalétique » s’accompagne d’une « bonne protection » des espaces privés. 

La phase de réalisation simplificatrice


Après la construction des supports, un travail d’épuration est effectué, de traitements des couleurs, de typographie… Le designer choisit parfois des objets pour mettre en mouvement l’espace et la dynamique.

Personnellement, la plupart du temps, j’ai eu la chance de pouvoir exprimer une liberté de créativité totale, mais cela peut dépendre de certains projets. Par exemple, si l’identité du lieu est déjà très forte, comme au château de Versailles, la signalétique possèdera les mêmes codes visuels pour que cela soit cohérent, et il y aura alors un peu moins de liberté créative.

A contrario, si dans un petit château l’identité graphique n’est pas forcément aboutie, il est possible de créer beaucoup d’éléments et de s’amuser : les couleurs, la typographie, le traitement des images…

La plupart du temps les propriétaires désirent des choses nouvelles et innovantes. Et c’est ce qui marche auprès du public !

Deux exemples :
– Lorsque nous rentrons dans le Centre Georges Pompidou, la signalétique est un peu « dans tous les sens » mais les informations sont inscrites en « énorme ». La signalétique est à l’image du Centre qui brasse de nombreuses œuvres et un public très riche. In fine, le tout est homogène et compréhensible : cohérent. C’est ce qui est attendu de la signalétique ! 
– À Montmartre, a contrario, ce sont de petits panneaux à hauteur des yeux, afin de ne pas envahir et gâcher l’architecture intérieure qui est plus « discrète ». Il faut davantage chercher l’information, mais la signalétique n’a pas besoin d’être trop visible, car le touriste y passe peu de temps. Le touriste cherche à « faire un tour dans le bâtiment ».

Y-a-t’il des « trucs » spécifiques à connaitre? Des codes de signalétique ?

Dans l’édition, il existe une mise en page et une hiérarchisation des titres normée : gros titre, sous titre et le texte.

Pour la signalétique, c’est la même chose : il faut la considérer comme une porte d’entrée visuelle afin de savoir quel cheminement emprunter. 
Cela commence avec un grand panneau à l’entrée, comme les gros titres des magazines. Puis cela diminue jusqu’aux petits cartels ou aux brochures de l’exposition. Comme un entonnoir, petit à petit, les tailles se rétrécissent, du global au singulier.

A quoi faut-il faire particulièrement attention lorsqu’on installe sa signalétique à l’intérieur d’un monument ?

La difficulté principale est le budget : la signalétique est importante mais elle doit être fixée dans un budget.

Le but est qu’elle soit évocatrice, visible, « imprégnante » pour le visiteur et qu’elle dure dans le temps. 

Pour trouver les solutions et les bonnes personnes, il faut l’intégrer dans le budget. Par exemple, si le propriétaire cherche un designer en Bretagne, il faudra penser éventuellement aux coûts de transports, et nous devrons faire des choix pour respecter les coûts limites.

Mis à part le budget, il faut prêter particulièrement attention à respecter l’architecture du lieu : cela peut être compliqué selon les bâtiments. Par exemple, si le plafond est trop haut, au lieu d’y fixer des panneaux nous pouvons installer des bandes de couleurs au sol.

Une « bonne signalétique » coûte combien ? Existe-t-il des « astuces » pour limiter les frais ?

Cela dépend du degré d’exigence du porteur de projet !

S’il désire des néons, des volumes suspendus, cela coûte très cher. Sinon il existe déjà des supports de communication, des cadres A4 par exemple, avec une possibilité de renouvellement qui est moins cher.

Pour les budgets intermédiaires, cela peut être de l’adhésif collé sur des supports plats et des murs, mais cela prend beaucoup plus de temps car cela nécessite un travail manuel dans un atelier.

Où la signalétique doit-elle être positionnée dans le lieu de visite ?

Cela dépend du lieu mais surtout du message : de nombreux critères existent, notamment le respect du lieu et du sujet. 

De même, il faut que la typographie « épouse le lieu ». Par exemple, pour une exposition contemporaine, elle sera plutôt fine et géométrique, tandis que pour Montmartre une typographie littéraire, fine, douce… Pour cet espace, il s’agit de respecter le lieu. La signalétique sera alors peu visible au milieu des photographies des touristes.

Quels conseils donneriez-vous à un propriétaire qui désire installer une signalétique efficace ?

Si le propriétaire désire conserver son lieu et ne pas le dénaturer, cela nécessitera une signalétique discrète.

Cependant, s’il préfère mettre en avant des évènements et des activités touristiques, il y a la possibilité de créer des choses plus imposantes et de s’amuser un peu dans la création.

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