L’aventure du château de Guédelon

Véritable expérience immersive au coeur du Moyen-Âge, l’aventure du château de Guédelon est un chantier patrimonial unique en son genre.

Introduction

Quelque part dans l’Yonne, dans une ancienne carrière désaffectée perdue entre Auxerre et l’ouest de la vallée de la Loire, s’élève pierre par pierre, depuis 1998, un véritable château médiéval. Né d’une idée du propriétaire, l’objectif de cet ambitieux projet n’est rien de moins que la construction d’un château fort selon les moyens du premier tiers du XIIIe siècle.

Exit les techniques et matériaux modernes, le maître-mot est authenticité : ce chantier qui se veut expérimental utilise exclusivement les ressources dont disposaient les constructeurs du Moyen-Âge. Un projet unique, qui s’inscrit dans la durée et rassemble des centaines d’artisans et de bâtisseurs : cette aventure, c’est celle de Guédelon.

Génèse de l’aventure de Guédelon

C’est au château de Saint-Fargeau que l’idée fait son chemin dans la tête de son propriétaire, Michel Guyot. Ce dernier est déjà expérimenté dans le domaine de la restauration de châteaux. L’idée tient en quelques mots : construire de toutes pièces un château fort avec les méthodes du XIIIe siècle, sur un terrain complètement vierge.

C’est une démarche qui se veut expérimentale. En effet, le chantier est une source unique de connaissances sur le déroulement intégral de l’édification d’une forteresse : les moyens nécessaires, les acteurs à mobiliser, les potentielles contraintes. Voilà comment au beau milieu d’une carrière de grès ferrugineux de Bourgogne, finit par être posée le 20 juin 1997 la première pierre du futur château de Guédelon.

Créer une histoire au château de Guédelon

Qui dit archéologie expérimentale dit mise en contexte. Pour cela, Michel Guyot n’a pas voulu faire les choses à moitié. S’entourant d’historiens, il décide de donner une histoire au château. Bien qu’elle soit fictive, elle est documentée.

Le chantier commence en 1228, sous la régence de Blanche de Castille et suivant le désir de Guilbert Courtenay, un petit seigneur (imaginaire) vassal du baron de Toucy. La construction ex nihilo du château-résidence doit respecter les canons architecturaux fixés par Philippe-Auguste, roi de France jusqu’en 1223. Il est prévu d’élever un donjon circulaire, de hautes courtines terminées par un chemin de ronde, mais aussi une chapelle, une chambre seigneuriale ainsi qu’un moulin hydraulique.

C’est précisément ce qui fait la richesse du projet de Guédelon : les concepteurs et bâtisseurs résolvent les problèmes que leur pose chaque étape au fur et à mesure de l’avancée du chantier. Tout à fait comme l’auraient fait le maître d’ouvrage et les artisans sous Philippe-Auguste.

Les métiers & savoir-faire

L’idée étant d’expérimenter via la méthode elle-même, il s’agit de rassembler tous les corps de métiers nécessaires à la réalisation du projet. C’est ainsi que des dizaines d’artisans se côtoient à Guédelon pendant toute une partie de l’année. Qui peut se targuer aujourd’hui de connaître un chaufournier, un gâcheur, un taillandier ou encore un cordier ? Ce sont des métiers essentiels à la réalisation du château. Il y a également d’autres métiers traditionnels davantage connus du public, comme les tailleurs de pierre, les charpentiers et les tuiliers.

Au total, une quarantaine de salariés se dédient à la construction du château. La remise à l’honneur de savoir-faire ancestraux est un point fort de Guédelon. Le site use du fort potentiel attractif de l’artisanat médiéval pour attirer les publics sur le lieu du chantier.

Les différents enjeux et impacts entourant Guédelon

L’aventure de Guédelon est intéressante à plusieurs point de vue : archéologique, scientifique, mais également disciplinaire, pédagogique et économique.

En effet, ce « labo à ciel ouvert » qu’est le chantier ne peut avancer sans la réflexion constante d’un comité au sujet de la planification des travaux, des plans, du choix des matériaux et de tout ce qu’exige la recréation d’un château médiéval. 

Le comité scientifique de Guédelon se compose d’une archéologue, d’un professeur d’archéologie, d’un architecte en chef des monuments historiques (ACMH), d’un chargé de recherche au CNRS, d’un historien de l’architecture et d’un castellologue. Ceux sont eux qui donnent la marche à suivre pour la bonne réalisation du chantier. 

Il s’agit non seulement de prévoir mais également d’analyser après coup, la confrontation théorie/réalité. Guédelon est un lieu de foisonnement intellectuel où les intelligences archéologique, historique et artistique se rencontrent et dialoguent, pour garantir au projet toute sa dimension authentique.

La richesse pédagogique de Guédelon

De cette multiplicité des approches disciplinaires découle la richesse pédagogique du lieu. C’est sans doute là que réside la vocation première de Guédelon. La transmission à un public, jeune, familial ou même plus âgé, est au cœur de l’aventure. Le chantier est en permanence ouvert au public, qui peut ainsi profiter de l’immersion dans le XIIIesiècle. La question de la transmission, de la préservation et du partage de savoir-faire ancestraux est l’essence même de Guédelon. Les visiteurs peuvent se balader à loisir sur le chantier, observer les artisans en plein travail, échanger avec les ouvriers… Une véritable expérience qui plaît et attire les visiteurs. 

Le voyage dans le temps s’agrémente d’une vraie dimension pédagogique. Il s’agit de vulgariser tout un pan de l’Histoire, grâce à la pratique, à un large public. Tout est pensé pour donner aux visiteurs une meilleure compréhension du processus de construction d’un château. L’idée est également d’apporter une connaissance plus fine de toutes les démarches et les métiers que cela implique.

L’impact de Guédelon sur le territoire

L’intérêt est aussi d’ordre économique puisque ces visites en continu sont l’âme du chantier -ce qui le fait vivre, au sens premier d’abord. Les visites éducatives et l’adaptation de l’offre touristique à un public plus large font de Guédelon un moteur de retombées économiques pour le site et la région. 

Le chantier a en effet créé une centaine d’emplois. Il fait également intervenir 650 bénévoles. Chroniqueurs-médiateurs, universitaires et chercheurs travaillent pour certains à plein temps in situ. Devenu le deuxième site touristique de Bourgogne, le chantier attire des visiteurs étrangers. Il a même été sollicité pour le tournage d’une série britannique en 2014 !

Conclusion

Riche d’identités multiples, à la fois lieu patrimonial, scientifique, touristique, artisan, pédagogique et historique, Guédelon concentre un ensemble de savoirs et de savoir-faire aussi divers que complémentaires. Devenu un lieu emblématique du patrimoine français, mais aussi de la valorisation, de l’expérimentation et de la recréation, le chantier est un exemple vivant de la renaissance du patrimoine médiéval. La visée du projet et le succès de sa mise en œuvre en font un objet d’étude unique en France, fascinant de la même manière amateurs et chercheurs, petits et grands.

Pour aller plus loin 

Organiser une reconstitution historique dans un château

Les chantiers participatifs au service du patrimoine

Lancer des activités dans un site historique