Des bactéries pour rénover sa façade !

Dans cet article, Hephata fait part d’une anecdote amusante : l’emploi de bactéries pour rénover sa façade !

Ce qu’il faut retenir

Longtemps perçues comme des ennemies des œuvres d’art et des bâtiments, certaines bactéries sont aujourd’hui utilisées en restauration.

En effet, celles-ci peuvent favoriser :

  • La régénération des tissus minéraux (pierre, marbre, calcaire, etc., …) ;
  • L’absorption des micro-organismes corrosifs (champignons par exemple).

Introduction

Malgré leur dureté et leur résistance, les matériaux de construction souffrent du passage du temps. Les monuments historiques nécessitent donc des restaurations ponctuelles afin que leurs architectures, tant intérieure qu’extérieure, reprennent leurs éclats d’antan. Le plus compliqué réside dans la recherche d’une solution innovante afin que les méthodes de restauration des matériaux ne portent pas atteinte à leur intégrité et ne produisent pas de dégâts collatéraux.

Cette solution innovante apparaît dans l’emploi de bactéries qui permettent, d’une part de renforcer le maillage de la pierre, et, d’autre part d’éradiquer la formation et la progression de micro-organismes facteurs de détériorations.

Restaurer le patrimoine : la bio-minéralisation

La bio-minéralisation est un processus opéré par des molécules organiques afin de reproduire une structure minérale. On parle alors le biominéral car la nouvelle matière étant composée d’éléments vivants, elle se révèle davantage résistante que son homologue minéral.

En restauration, la bio-minéralisation est une technique révolutionnaire ayant pour objectif le traitement de la pierre et, plus particulièrement, du calcaire. Elle consiste à pulvériser des bactéries en surface du bâtiment afin d’en couvrir son enveloppe matérielle. A cette suite, les restaurateurs pulvérisent également une substance nutritive en vue de nourrir les bactéries. Ces organismes vivants vont alors jouer le rôle d’un véritable épiderme pour la pierre. Ils vont se glisser dans les interstices de la pierre, se nourrir, se multiplier et reproduire la structure minérale de la pierre, permettant ainsi de renforcer sa résistance sans pour autant modifier son intégrité au niveau de sa forme et de sa teinte.

La bio-minéralisation est tout à fait révolutionnaire. Non seulement de part la rapidité d’action des bactéries, mais également du fait que c’est une méthode tout à fait naturelle évitant l’intégration de molécules étrangères à la pierre.

La bio-consolidation : une alternative à la restauration de la pierre

La bio-consolidation prétend, elle aussi, à se servir des bactéries, dans l’objectif de renforcer la résistance de la pierre. Néanmoins, il s’agit cette fois de s’intéresser aux bactéries déjà présentes et de leur appliquer une solution nutritive afin qu’elles reconstituent l’épiderme aux endroits où ce dernier est manquant ou abîmé. L’activité métabolique de ces bactéries permet ainsi de recréer la texture de la pierre et de palier à sa porosité.  

Utiliser les bactéries contre l’encrassement

Un autre phénomène participant à la dégradation des matériaux de construction est l’encrassement et la formation au cours des siècles de tâches et de salissures. On peut aussi quelquefois constater le développement de champignons entraînant la création de traces de moisissures. Notons que ce phénomène peut apparaître à la fois sur des éléments architecturaux et sculpturaux mais également sur des tableaux, des peintures ou différents objets.

Là encore, l’emploi de bactéries peut s’avérer réellement adéquat. En effet, celles-ci peuvent freiner la progression et la formation de champignons ou autres micro-organismes.

Exemple : restauration de la Basilique San Lorenzo de Michel Ange

Le projet de bio-minéralisation s’est appliqué sur l’espace renfermant la Chapelle funéraire des Médicis, la Nouvelle Sacristie. Il se trouvait qu’une partie du marbre était entachée depuis toujours par des salissures brunes. Celles-ci seraient provenues de la décomposition du corps en putréfaction d’Alexandre de Médicis. Or, rien n’avait jamais pu faire disparaître les vilaines tâches brunes. Rien, … jusqu’à ce que les restaurateurs aient l’idée de confier le défi à des bactéries ! Ils ont ainsi utilisé la bactérie Serratia Ficaria SH7. Le marbre étant un dérivé du calcaire, la bactérie avait la capacité de le nettoyer et de le regénérer. La bactérie a ainsi été appliquée sous la forme de gel et au bout de quelques jours, le miracle s’est produit : toute salissure avait disparue.

Exemple : restauration du Couronnement de la Vierge

Le Couronnement de la Vierge est une fresque peinte par Carlo Bononi au XVIIe siècle. Celle-ci a été peinte sur la coupole de l’église Sainte-Marie à Vado en Italie. La peinture, infectée de micro-organismes détériorant sa qualité picturale a été analysée par la microbiologiste Elisabetta Caselli. Elle a mis en lumière le fait que ces micro-organismes pouvaient sans doute être combattus par la bactérie Bacillus. En effet, cette dernière se révèle inoffensive pour les pigments picturaux mais participe pourtant à l’éviction des infections. Là encore, l’emploi de la bactérie permet d’éradiquer les micro-organismes infectieux, sans pour autant porter atteinte à l’intégrité initiale de l’œuvre.

Conclusion

Les bactéries ont longtemps été perçue comme ennemies de l’art, de l’architecture et de la peinture. En effet, certaines sont extrêmement nuisibles, se développant sous la forme de champignons. Ces derniers entraînent des traces de moisissures et impactent la qualité des matériaux en les fragilisant. C’est ce qui s’est passé à Lascaux par exemple, où les grottes ont dû être fermées au public, du fait de l’expansion d’un champignon fragilisant les pigments.

Néanmoins, certaines bactéries peuvent aujourd’hui être employées afin de restaurer les œuvres, les objets ou les bâtiments abîmés. Les techniques de bio-minéralisation et de bio-consolidation permettent ainsi de réparer le tissu minéral de la pierre, du marbre ou du calcaire. Autrement, les bactéries peuvent être appliquées sur les surfaces infectées par d’autres micro-organismes afin d’éviter que ceux-ci ne prolifèrent et ne détériorent la surface en question.

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