Comment valoriser la propriété forestière d’un domaine historique ?
L’important à retenir dans cet article :
Propriétaire d’un domaine forestier, il apparaît parfois difficile de trouver les clés pour gérer et capitaliser sur ce patrimoine complexe. Régir une richesse naturelle telle qu’une forêt peut se révéler un casse-tête pour les propriétaires. D’autant qu’ils doivent composer avec les aléas et les contraintes qu’elle implique. Dès lors, il est conseillé de trouver des experts dans la gestion de son espace forestier afin de l’exploiter durablement.
Les points clés de cet article :
– Il faut inciter les propriétaires à s’appesantir d’avantage sur la gestion de leur patrimoine forestier
– Il faut se rapprocher d’un mode de gestion raisonné
– S’entourer de professionnels en la matière est nécessaire
Introduction
Aujourd’hui en France métropolitaine, on compte quasiment 17 millions d’hectares de forêts dont les ¾ sont privés. Propriétaires ou sociétés de droit privé, institutionnels (banques, assurances, caisses de retraites), ils sont environ au nombre de 3 millions. De surface moyenne – approximativement 4 hectares – ces espaces forestiers sont aussi le reflet de beaucoup de disparités. La plupart de ces espaces correspondent d’ailleurs à de très petites parcelles. 2,9 millions sont propriétaires de surfaces inférieures à 4 hectares, le reste concerne les gros propriétaires. Mais comment gérer toutes ces surfaces ?
Julien Terrier, ingénieur agronome chez Forêt Patrimoine, nous aide à comprendre comment gérer efficacement ce bien forestier.
Julien Terrier, pouvez-vous nous parler de votre parcours ?
Après deux années en classe préparatoire scientifique, j’ai intégré AgroParisTech, grande école d’ingénieur agronome. Diplômé en 2017 à l’issue d’une spécialisation en Gestion, Innovation et Performance des Entreprises, j’ai poursuivi mon parcours académique dans le cadre d’un Master II de droit rural. Cette formation complémentaire à la formation d’ingénieur a permis de me préparer aux métiers de l’expertise foncière et forestière.
En tant que chargé de gestion, transaction et expertise au sein de Forêt Patrimoine, mes missions sont diverses. Je conduit des expertises forestières. J’effectue également des transactions forestières. Enfin, je gère le patrimoine forestier pour le compte de propriétaires privés.
En associant une très bonne connaissance des enjeux actuels du monde rural, agricole et forestier, avec des compétences de gestion forestière et financière, nous pouvons apporter un conseil dans les domaines juridique, technique et économique, voire fiscal. Ainsi c’est une expertise à la fois de terrain et de gestion patrimoniale.
Quelles sont les missions de Forêt Patrimoine ?
Forêt Patrimoine est la cellule immobilière des experts du Comité des Forêts, le plus ancien organisme de défense de la forêt privée. Nous proposons de conseiller sur le long terme ou de façon ponctuelle des propriétaires forestiers dans la gestion, l’évaluation ou la transaction de leur patrimoine forestier. La grande diversité des situations rencontrées permet d’aborder chaque situation unique avec le recul nécessaire.
Vous pouvez retrouver toutes les actions de Forêt Patrimoine sur leur site ainsi que leur programme.
D’après vous, pourquoi les forêts sont-elles mal exploitées aujourd’hui ?
Parmi cette grande variété de propriétaires forestiers, beaucoup ont reçu ce patrimoine par le biais d’héritages successifs ; il en résulte alors une certaine méconnaissance des limites des biens détenus, souvent difficiles à localiser et exploiter. Ainsi trop de surfaces sont laissées à elles-mêmes et ne sont pas entretenues …Cependant, selon l’article L112-1 du Code Forestier, «Sont reconnus d’intérêt général la mise en valeur et la protection des forêts ainsi que le reboisement » ! Il y a donc, d’une certaine manière, une responsabilité à entretenir et valoriser son capital forestier.
Quels sont les objectifs à poursuivre dans le cadre d’une bonne gestion de la forêt ?
Dans la mesure du possible, il faudrait aller vers une meilleure gestion de son patrimoine, l’entretenir et le valoriser en mobilisant une partie de ses bois. Le but est d’inciter les propriétaires à produire du bois en plus de les inciter à en récolter. Ainsi, établir un suivi et une protection des ressources naturelles afin de renforcer la qualité de la terre est primordial si l’on veut maintenir son capital forestier en l’état.
Quelles sont les sources de revenus d’un propriétaire forestier ?
Les principales sources de revenus proviennent de la vente de bois qui représente une recette majeure. Par ailleurs, le propriétaire peut être amené à louer ses espaces forestiers pour la chasse et profiter ainsi des bénéfices financiers de cette activité.
Ainsi, une forêt est une entreprise qui doit dégager un résultat. Cette gestion permet l’obtention d’une rente courante et continue sur du moyen terme qui soit la plus élevée possible. En parallèle, la gestion forestière permet la constitution d’une réserve en capital mobilisable en cas de besoin, elle permet également de pérenniser les espaces forestiers.
Quels sont les différents modes de gestion possibles ?
Il convient de distinguer les modes de traitement sylvicoles des autres modes de gestion. Bien que le traitement et la gestion soient intimement liés, un arbitrage sain est patrimonial. Le traitement sylvicole est indispensable pour valoriser la forêt dans son histoire et pour servir la transmission. Une vision encore largement répandue est de considérer une forêt comme un coffre-fort, dans lequel on se servirait au gré des besoins familiaux. Mais on oublie que la forêt ne s’est pas constituée d’elle même, que des ancêtres l’on façonnée, ont œuvré à son développement. Si la forêt est souvent patrimoine reçu, elle est également un patrimoine à transmettre aux futures générations.
En privilégiant la production de bois d’œuvre de qualité, c’est à dire en sélectionnant les individus qui présentent le meilleur potentiel de production de bois d’œuvre (qualité et vitalité), on s’assure de gérer au mieux une forêt. Cette sylviculture est par ailleurs un moyen durable de maintenir le carbone qui se fixe lors de la croissance des arbres ; la part de bois d’œuvre produite étant plus importante.
La gestion à long terme
Rester prudent dans la gestion de son capital forestier
« Une forêt est un capital qui produit de lui même l’intérêt qu’il rapporte. Toute la question est de déterminer cet accroissement et les conditions dans lesquelles il sera avantageux, de façon à ce que l’on puisse le prélever par exploitation sans nuire au capital et sans compromettre la reconstitution de l’intérêt, c’est-à-dire son nouvel accroissement dans l’avenir. » Gurnaud (1890)
Pour s’assurer d’une gestion sur le long terme il faut avant tout être prudent pour ne pas détériorer le capital de bois sur pied.
Ne pas céder aux effets de mode
En outre, il convient de ne pas céder aux effets de mode, que ce soit dans les modes de gestions ou sur le choix des essences. En effet, le temps des forêts, n’est pas celui des hommes. La forêt est une invitation à l’humilité et à la prise de recul.
Pouvez-vous me parler de ProSilva ? Quelles sont les particularités de cette approche ?
ProSilva est une association de forestiers qui promeut et défend une sylviculture à l’échelle de l’arbre, en privilégiant un traitement dit « irrégulier ». Le sylviculteur n’intervient que par petites touches pour récolter les bois mûrs ou sans avenir sylvicole, favoriser les arbres d’avenir, éclaircir les semis, enrichir là où le renouvellement tarde. Une méthode qui permet de maintenir un niveau de productivité économique élevé, de protéger la biodiversité, la qualité des sols, de l’air et de l’eau, tout en produisant de plus en plus de bois de qualité. Cette sylviculture d’arbre permet d’obtenir des revenus soutenus et réguliers tout en ayant des forêts multifonctionnelles, continues et stables.
Les opérations sylvicoles visent à concentrer l’accroissement sur les arbres de qualité, qui permettrait aussi d’utiliser au mieux le potentiel de production de la station, de refuser les sacrifices d’exploitabilité, de contenir les charges de renouvellement, d’aboutir à des peuplements plus stables, moins sensibles aux aléas climatiques et biologiques …
Gérer seul sa forêt ou faire appel à un professionnel ? Quels sont les avantages et inconvénients ?
La forêt est un patrimoine fragile et complexe, qui ne supporte pas les événements brusques. Afin de la pérenniser et d’œuvrer à sa valorisation, elle doit être le reflet d’une symbiose entre le propriétaire forestier et son gestionnaire, au-delà d’une simple assistance technique. Afin d’apporter un regard extérieur neutre, il est important de se faire accompagner par un expert qui dispose d’une connaissance précise des acteurs et des organismes forestiers. Les professionnels indépendants proposent des services personnalisés, en adéquation avec vos attentes et les potentiels de chaque forêt.
De l’estimation de vos valeurs forestières à la gestion courante de vos bois, l’offre des services proposés par les experts forestiers est large ; la défense des intérêts du propriétaire forestier étant l’objectif de tout bon expert.
Quels sont les acteurs à qui faire appel pour être aidé dans la gestion de sa forêt ?
À l’heure actuelle, il existe de nombreux professionnels de la gestion forestière. Qu’ils soient gestionnaires forestiers professionnels, experts forestiers ou membres de coopératives forestières, ces conseils s’adaptent aux différents propriétaires. Ils proposent la plupart du temps des services sur-mesure. Beaucoup de structures viennent en aide aux propriétaires, il ne faut donc pas hésiter à se tourner vers des professionnels.
Conclusion
Etre propriétaire d’un espace forestier comporte aujourd’hui de nombreux avantages mais aussi des contraintes. En effet, comme vu précédemment, la gestion d’un patrimoine forestier représente un enjeu économique majeur apportant une source de revenus non négligeable mais le tout est de savoir comment gérer et exploiter de manière responsable ce potentiel. Les modes de gestion sont nombreux et s’entourer d’un environnement de professionnels de l’expertise et du conseil représente un atout considérable pour trouver les réponses adaptées à ses besoins.
Pour aller plus loin :
Comment gérer et optimiser le domaine forestier de son château ?
La méthode ROSEE pour choisir les essences d’arbre dans le jardin de son château