Comment développer des activités au cœur des abbayes ? Dans cet article, Hephata vous donne quelques inspirations et pistes de réflexions.
L’important à retenir de cet article :
Dans cet article, nous vous présenterons différents développements d’activités mis en place dans des abbayes, à travers un focus sur les différentes propositions réalisées par l’association Propolis autour de l’Abbaye de Bonnecombe.
En effet, généralement, les abbayes sont des lieux spacieux et chargés d’histoire, souvent entourés d’un patrimoine naturel remarquable. Ainsi, les abbayes présentent des atouts majeurs pour la mise en place d’activités variées.
Introduction :
Les abbayes sont intimement liées au monachisme. Initialement issues de l’Orient, elles se sont beaucoup développées en Occident au fil des siècles.
Avec l’avènement de la chrétienté, des abbayes furent construites par centaines. La vie monastique s’appuie sur différents piliers, parmi lesquels le travail, souvent agricole. En effet, « Ora et Labora », signifiant en français « prie et travaille », est une expression latine faisant référence à la vie monastique bénédictine. À travers le travail dans les champs, les abbayes avaient pour vocation d’être auto-suffisantes.
En janvier 2021, la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, Jacqueline Gourault, s’est rendue dans le Calvados afin d’y signer une convention de partenariat de sauvegarde du patrimoine. Le premier édifice à bénéficier de ce programme est l’Abbaye de Mondaye, située à Saint-Martin-de-Mondaye.
Cette actualité démontre un intérêt toujours présent pour le patrimoine historique, notamment le patrimoine des abbayes. Assurément, la dimension humaine de ces lieux de vie particuliers les rend fascinants, tout comme leur architecture souvent remarquable.
Au même titre que les châteaux, les abbayes sont des témoins de l’évolution des styles architecturaux en France et de l’histoire du pays. C’est un patrimoine reconnu et valorisé, à l’instar de l’Abbaye de Fontenay en Bourgogne-Franche-Comté, classée au Patrimoine Mondiale de l’Unesco.
Pour sauvegarder de tels lieux, il est nécessaire de mettre en place des activités afin de les animer. L’enjeu est de les rendre rentables financièrement, les bénéfices pouvant par la suite être réinjectés dans la mise en valeur, le développement et l’entretien du lieu.
Cependant, il est important de garder une cohérence entre l’histoire du lieu et les nouvelles activités. Pour cela, il est judicieux de s’orienter vers des activités ayant une dimension sociale, environnementale, de bien-être ou spirituelle.
Focus sur l’étude du projet Propolis à l’Abbaye de Bonnecombe
Pour la première édition du Prix du Patrimoine paysager et écologique, la Fondation Etrillard a sélectionné le projet de l’association Propolis pour la réhabilitation et la restauration des espaces paysagers de l’Abbaye de Bonnecombe.
Bien que tout ce que propose l’association Propolis est au stade de projet, il s’agit d’un travail d’étude très intéressant, axé autour de la construction d’un projet cohérent, qui peut être une excellente source d’inspiration. L’aboutissement sera par la suite décidé avec l’évêché de Rodez et Vabres, propriétaire des lieux.
L’Abbaye cistercienne de Bonnecombe dans l’Aveyron est un lieu patrimonial exceptionnel fondé au XIIème siècle. Inhabitée depuis 1965 et inoccupée depuis 2017, l’Abbaye est au cœur du travail d’étude réalisé pour le projet Propolis.
L’idée de l’association est d’implanter un centre de formation au sein de l’Abbaye ainsi qu’une pluralité d’autres activités axées sur les questions environnementales et sociétales.
1. La valorisation des extérieurs de l’Abbaye
Les sites patrimoniaux sont généralement entourés d’une nature remarquable. C’est assurément un atout à valoriser pour les propriétaires et gestionnaires de lieux patrimoniaux. En effet, les visiteurs apprécient de plus en plus le patrimoine naturel. Par ailleurs, de nouvelles tendances touristiques attestent de cet attrait grandissant pour la nature, tels que l’agritourisme ou le slow tourisme, ainsi que toutes les formes de tourisme durable.
À travers la mise en place des différentes actions, l’association Propolis exprime un message fort et affirme l’importance des questions environnementales et sociétales à ses yeux.
Cadre naturel remarquable, le site de l’Abbaye, d’une dimension de 13000m2 bâtis, s’étend sur plus de 180 hectares comprenant de la forêt, un parc ainsi que des espaces au potentiel agricole comme un verger et un potager. Assurément, l’Abbaye de Bonnecombe possède les atouts nécessaires pour pratiquer une agriculture innovante et être le plus auto-suffisante possible.
Les extérieurs seront mis à profit pour y développer plusieurs activités et équipements, tels que :
– Un jardin ornemental ;
– Une pommeraie ;
– Un potager et jardin en agroécologie pour les visiteurs ;
– Un potager en permaculture et un nouveau verger ;
– Un espace dédié à la culture de plantes à parfum en agroécologie.
En effet, L’Abbaye de Bonnecombe prévoit d’expérimenter les méthodes de l’agroécologie en consacrant une partie de ses extérieurs à la production de plantes à parfums, aromatiques et médicinales, en proposant 300 espèces différentes.
Par ailleurs, des ateliers liés à la nature seront mis en place au sein de l’Abbaye, ainsi qu’un élevage de papillons. Un hangar agricole sera aussi créé.
2. Une offre diversifiée permettant d’attirer différents publics
La superficie impressionnante de l’Abbaye de Bonnecombe est un atout pour y développer plusieurs activités variées permettant ainsi de s’adresser à un public plus large.
En tant que propriétaire ou gestionnaire de lieu patrimonial, il est important de réaliser un diagnostic avant de se lancer dans le développement d’activité.
– Comprendre les atouts du lieu et de son territoire ;
– Analyser les attentes et besoins du public, autant des touristes que des locaux ;
– Se positionner en fonction des critères précédents.
Le projet Propolis à l’Abbaye de Bonnecombe utilise les atouts du lieu. Le premier atout est l’espace : en effet, un lieu aussi vaste que celui-ci permet d’y implanter différentes activités.
Chaque activité mise en place répond à une demande plus ou moins explicite du public.
a) Les activités culturelles pour attirer un large public
Les activités culturelles sont certainement celles qui attirent le plus de public. De ce fait, pour un propriétaire ou gestionnaire de site historique, inclure la culture dans son offre est une excellente idée. En effet, le secteur culturel, très diversifié, possède de nombreux atouts :
– Accessible à tous les âges, les activités culturelles plaisent autant aux enfants qu’aux adultes ;
– La culture est un des pans principaux de l’attractivité d’un territoire. En devenant un lieu culturel reconnu, le lieu participe au développement de son territoire.
Afin d’inclure un maximum d’individus et d’élargir encore son public, il est judicieux de mettre en place des activités destinées aux amateurs comme aux professionnels.
Ainsi, l’un des volets du projet Propolis est l’accueil d’artistes en résidence avec la création d’ateliers d’artistes, implantant ainsi un centre culturel sur le site de l’Abbaye. Afin de compléter l’offre culturelle, le projet prévoit :
– Une salle de spectacle, ainsi que l’utilisation de l’Église en salle de célébrations et de concerts ;
– Un cabinet de musique et de poésie.
b) Les aménagements sociaux, le patrimoine au cœur de la vie quotidienne des habitants
Le patrimoine fait intégralement partie du territoire et de l’histoire d’une région. Pourtant, il est souvent oublié, laissé de côté. Pour les gestionnaires ou propriétaires de sites patrimoniaux, transformer son patrimoine en lieu de vie permet de l’inclure dans la vie de la commune. De cette manière, le lieu s’intègre dans le quotidien des habitants, qui, ne l’oublions pas, constituent son premier public.
Le projet Propolis à l’Abbaye de Bonnecombe inclut un volet social très important. De plus, en redevenant un lieu de vie à la fois pour les personnes qui viendront en formation ou en résidence et pour les locaux, l’Abbaye de Bonnecombe retrouve sa vocation initiale. Toujours dans une démarche sociale, l’Abbaye accueillera un lieu de vie et d’accueil pour une dizaine de jeune de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE).
De cette manière, l’Abbaye de Bonnecombe retrouve sa vocation d’accueil des personnes dans le besoin.
L’association Propolis prévoit aussi la mise en place d’un cabinet de médecine alternative, offre presque inexistante jusqu’alors sur le territoire, en proposant un lieu où penser la santé autrement. Cette démarche est en adéquation avec leur pensée générale de durabilité et de responsabilité.
3. Le cœur du projet : l’implication politique et sociétale du centre de formation
À travers cette activité qui constitue le cœur du projet, le patrimoine devient un acteur de la vie politique. En effet, le centre de formation aux questions environnementales répond à de grandes questions sociétales. En formant des individus à ces thématiques, ces problématiques qui gangrènent notre société, l’Abbaye de Bonnecombe prend une place très importante au sein de la politique, de l’éducation et de la société.
Il est important pour les propriétaires et gestionnaires de lieux patrimoniaux de comprendre les grands enjeux sociétaux.
Le centre de formation est l’activité principale du projet Propolis. Le centre proposera un cursus intitulé « Penser la modernité ». Cette formation dispensera des enseignements et des activités pratiques en lien les questions environnementales et sociales.
Le cursus est divisé en trois modalités, se destinant chacun à une clientèle différente. Les cursus proposés vont d’une semaine à neuf mois de formations, se destinant autant aux particuliers qu’aux professionnels.
Les étudiants du cursus seront logés, nourris et blanchis pour un forfait mensuel allant de 650€ à 800€. Les cours seront dispensés grâce aux subventions sollicitées, les participants n’auront donc pas à payer la formation.
Cependant, le centre de formation est un véritable atout économique pour la région. En effet, les individus venus en formation pourront :
– Visiter la région et découvrir le territoire ;
– Dépenser dans les activités et commerces de proximité ;
– Participer à la vie économique de la région.
Le centre de formation constitue l’atout majeur du projet grâce sur plusieurs aspects : les loyers des étudiants assurent une rentabilité du lieu sur le long terme. De plus, le lieu constitue un écrin idéal pour une formation aux questions environnementales et sociales, ce qui en fait un rude concurrent face aux quelques rares écoles ou universités proposant ce type de cursus.
4. Un grand projet au budget colossal
Afin d’accueillir toutes ces activités, l’Abbaye de Bonnecombe va être entièrement nettoyée et rénovée. L’association prévoit plusieurs années de nettoyage, de travaux et d’aménagement.
Pour un propriétaire ou gestionnaire de lieu patrimonial souhaitant le rénover afin d’y développer un nouveau projet, les chantiers d’insertions ou de bénévoles sont une bonne solution.
Il peut aussi lancer une campagne de financement participatif. En effet, les contributeurs peuvent aussi devenir acteurs du chantier s’ils le désirent.
Pour financer un tel projet, nécessitant la réhabilitation du lieu, des travaux de rénovation et d’aménagements, l’association Propolis a lancé des levées de fonds, bénéficiant ainsi de différentes aides :
– Des subventions publiques, de la part des collectivités locales, de l’Etat et de l’Europe à hauteur de 30% du coût du projet ;
– Des financements privés, venant d’entreprises, de fondations et de particuliers, représentant 30% du financement du projet.
L’association Propolis a perçu les atouts majeurs de l’Abbaye de Bonnecombe et de son territoire. Leur étude donne des axes de réflexions aux propriétaires afin d’y créer une offre utile pour le territoire.
5. D’autres exemples de développement d’activités
L’exemple de l’Abbaye de Bonnecombe nous a permis d’explorer divers secteurs d’activités : la formation, l’écologie, l’agriculture et la cohésion sociale.
Cependant, le développement d’activité au sein d’une abbaye peut aussi concerner la mise en tourisme du lieu avec la création d’une offre d’hébergement comme à l’Abbaye des Capucins à Montauban. Enfin, le développement peut aussi être très diversifié et englober différents secteurs d’activité, comme au sein de l’Abbaye de Royaumont.
L’Abbaye des Capucins à Montauban
Située en Occitanie, cette abbaye du XVIIème siècle a été transformée en hôtel haut de gamme en 2006. L’établissement comprend un hôtel 4 étoiles d’une capacité de 116 chambres, un spa, une piscine et un restaurant.
En plein cœur de la ville, au bord du Tarn, l’Abbaye des Capucins présente tous les atouts d’un lieu d’hébergement touristique :
– Accessibilité ;
– Localisation idéale ;
– Proximité des commerces, des lieux de loisirs et de culture avec notamment le Musée Ingres Bourdelle à moins de 5 minutes à pied.
L’Abbaye des Capucins a de nouvelles ambitions, notamment la construction d’un nouveau bâtiment pour créer un véritable complexe hôtelier. Le projet devrait inclure :
– Un amphithéâtre de 200 places ;
– Deux nouveaux restaurants panoramiques en roof-top ;
– La création de 110 nouvelles chambres 3 étoiles, doublant ainsi la capacité d’accueil de l’hôtel.
Ces aménagements viennent compléter le patrimoine existant pour créer un nouveau lieu unique, mêlant patrimoine et modernité. Ainsi, le lieu est capable de répondre à la demande grandissante de la clientèle.
L’Abbaye accueille des particuliers venus découvrir la région ainsi que des touristes d’affaires et des entreprises, le lieu disposant d’espaces pour recevoir séminaires et réunions. De cette manière, le propriétaire des lieux a transformé l’abbaye en un véritable acteur touristique du territoire, participant au développement local et à l’attractivité de la région. Les travaux d’extension de l’établissement permettent de pérenniser l’offre tout en préservant le monument historique.
L’Abbaye de Royaumont
L’Abbaye de Royaumont a été réhabilitée en 1938, devenant alors le Foyer de Royaumont. Lieu d’accueil et de repos pour artistes et intellectuels, le lieu évolue par la suite en centre culturel international.
Forte de sa renommée acquise au cours des décennies, la Fondation gérant l’Abbaye de Royaumont a diversifié ses activités :
– un centre de formation et de recherche autour de la culture, des arts, des sciences humaines ainsi que l’environnement ;
– une libraire-boutique, ainsi qu’une bibliothèque musicale et une bibliothèque générale ;
– des espaces de séminaires et d’évènementiels ;
– un hôtel et un restaurant.
L’Abbaye organise des évènements annuels tel que le festival de musique de Royaumont. Consacré à la musique classique, la fréquentation augmente chaque année. Entre l’édition de 2017 et 2018, la fréquentation avait augmenté de 21%.
Conclusion :
Le développement d’activités dans des abbayes peut prendre différentes formes, en fonction des besoins et envies du gestionnaire des lieux. Toutefois, il faut aussi prendre en compte le territoire autour du lieu, comprendre son écosystème et comment rendre le lieu utile.
Les projets de développement d’activité au sein d’une abbaye peuvent nécessiter des travaux d’aménagements et de rénovation. Cela représente un investissement financier, plus ou moins important. Ainsi, en fonction de l’orientation du projet, différents acteurs peuvent soutenir sa réalisation.
Pour aller plus loin :
Les acteurs du patrimoine : le financement